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ENTRE DEUX VALISES

Pour les curieux qui ont du temps à perdre

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Le Féminisme

  • Photo du rédacteur: Lu.
    Lu.
  • 21 mars 2019
  • 10 min de lecture

Dernière mise à jour : 30 nov. 2021


Nous sommes les 8 mars, synonyme de « La journée internationale de la femme ». Je pense [et j'espère] que c'est la journée qu'on s'arrête pour réfléchir à ce que le mot féminisme implique/signifie/se manifeste aujourd'hui, si ce n'est que pour quelques minutes.


Cela fait à peine 79 jours que je vis en sol argentin, alors je vous partagerai ici comment ce mot m'est paru durant ce court séjour. La question n'est pas de minimiser un pays au profit de l'autre - car la différence entre un pays développé et un pays en développement ne peut pas se comparer, selon moi- , mais plutôt de vous raconter comment être une femme ici est tout un autre défi.


1. La sécurité


Tout d'abord, il faut savoir qu'il y a également un combat pour le droit des femmes ici, mais il n'a pas la même nature qu'au Canada. Si au Canada nous sommes au niveau de la lutte pour l'équité salariale, ici, on lutte pour qu'on ne nous assassine pas à cause de notre genre féminin. Bien sûr que la lutte pour l'équité salariale existe ici, mais disons que dans la pyramide de priorités, elle se trouve tout en bas. Il y a d'ailleurs plusieurs revendications de la part des féministes argentines, comme partout ailleurs en général, mais ici, celui du droit à la vie est encore un grand défi à surmonter, alors qu'au Canada il n'est pas un sujet de discussion depuis des années.


Sauf pour les canadiennes aborigènes.


*dab*



Le féminisme, ici, défend à prime abord la sécurité des femmes. J'ai pris l'habitude de regarder les nouvelles le matin lorsque je déjeune. Et à chaque matin, il y a un cas de [féminicide]...ou presque. Très honnêtement je vous avoue que je n'avais jamais entendu ce mot auparavant. Je connaissais le mot [homicide] qui -me semble- incluait le meurtre des femmes aussi, mais jamais entendu [féminicide]. Ça sonne violent. Ça rhyme avec pesticide. Je pensais que c'était un justintrudisme comme #womankind. Bref. Ce ne l'était pas. Bref bref.

C'est sûr que le contenu des médias est toujours sélectionné, alors je n'étais pas certaine si c'étaient des cas fréquents ici ou du pure sensationnalisme médiatique #fakenews.


Sauf que.


Il existe une ligne de secours pour les femmes violentées. La 144, pour dénoncer la

«violence de genre » (violación de género) dans toute l'Argentine. Elle est affichée en permanence sur l'écran de télé, en bas à droite sur toutes les chaînes de nouvelles (et même sur les murs du train de métro). C'est bien, j'ai pensé. Mais si ça existe, c'est pour répondre à un besoin aussi...ce qui est plutôt inquiétant.


Il y a seulement à peine 4 ans, en 2015, le mouvement #niunamenos (pas une de moins) est apparu en Argentine pour dénoncer la violence faites aux femmes, visiblement à travers les nombreux féminicides. Statistiquement parlant, chaque 36 heures une femme est assassinée en 2015. En 2017, ce chiffre augment à 1 femme chaque 18 heures. Tous ces cas se rapportent souvent à la violence conjugale, mais il y a des cas de violence faite par les pères, les beaux-pères, les exs et même les fils, les taxis, les voisins. Voilà pourquoi en si peu de temps, le mouvement #niunamenos s'est rapidement répandu en Uruguay, au Chili, au Pérou, en Espagne, et chaque année, le 3 juin (les dates varient selon le pays), une marche de plusieurs milliers de femmes mobilise les artères principales de la ville pour dénoncer le jemenfoutisme des systèmes judiciaires sur les cas de meurtres de femme. Féminicide.


Jusqu'à présent, j'ai vu:


- 1 cas d'un remisero (un chauffeur de remis, un service de taxi alternatif) qui a violé une fille de 14 ans, étant son chauffeur de famille depuis plus de 10 ans. Relâché après (seulement) 3 mois d'incarcération.


- 1 chanteur connu d'ici (dsl je n'ai pas retenu son nom) dire à la radio que les filles de 16 ans qui sont «chaudes» méritent de se faire violer, physiquement et psychologiquement.

Photo à l'appui.


- 1 médecin suranesthésier une patiente pour la violer et la battre a plusieurs reprises pour .....?????? je ne sais pas pourquoi, ce n'est pas mentionné. Par contre le médecin a (seulement) perdu son permis de travail.


- 1 fille de 11 ans violée par le copain de sa grand-mère, enceinte de ce viol, se faire donner une césarienne par ordre de la cour.




C'est inquiétant. C'est tragique. C'est triste. C'est angoissant.





Ces exemples sont des cas qui passent aux nouvelles aussi fréquemment que les Feux de l'Amour et je vous avoue, ça me fait un peu peur...inconsciemment je me suis retapée la série Ip Man sur Netflix. #wassup Je me dis que l'auto-défense est toujours un outil utile pour les filles/femmes. Le problème c'est qu'ici, tous les malfaiteurs sont toujours armés soit d'une arme à feu ou d'un couteau. Et ils sont toujours en pair et en moto pour pouvoir se sauver plus rapidement. C'est là que j'ai appris un nouveau mot #nouveaumot en espagnol: motochorro de moto+chorros [larrons]. Motolarrons? #lol Alors t'as beau faire des moves de wing chung improvisés, mais Donnie Yen n'appaît pas magiquement. Sous l'effet de surprise/choc/adrénaline, certaines femmes figent, d'autres courent, d'autres se protègent, mais la majorité terminent habituellement battues en pleine rue, gisant au sol jusqu'à ce que quelqu'un leur vienne en secours. Féminicide.


Plusieurs maisons sont munies de caméras, et les gens envoient les séquences enregistrées aux médias et à la police pour essayer de trouver les motochorros. Mais ce ne sont pas des histoires qui terminent bien, puisque les cas reportés ne sont pas pris au sérieux par la fiscalité. Je n'ai jamais vu quelque chose de tel passer aux nouvelles......sur une base quotidienne......si proche de moi.


La vigilence (vigilance? viligence? viligeance? vilijanz? :P) s'impose. Ce genre d'incidents se produit habituellement en Provincia, ce qui serait l'équivalent de la Région pour les Mourréalais. À l'intérieur des limites de la capitale fédérale, où j'habite, la sécurité est plus visible. Le jour comme la nuit, il y a un policier presque à chaque coin de rue, dans certains secteurs et le taux de criminalité est plus bas qu'en dehors des limites porteñas. Il faut quand même être vigilante, soit.


2. Le machisme


Le rapport homme-femme est bien distinct par ici; il y a un machisme bien évident. Je parle en généralisant, parce qu'il y a bien évidement des exceptions. Mais le machisme est un réel fléau en Argentine. Je l'ai constaté par les commentaires des hommes à la télé (talkshows, séries, nouvelles), dans la rue, dans les conversations dans l'autobus, dans les supermarchés, dans les blagues, dans l'ascenseur, dans les restaurants, bref, un peu partout.


On voit la femme comme quelque chose que l'on ne peut pas vivre ni avec ni sans.


On célèbre davantage sa beauté physique que son discours. On parle par-dessus elle. On lui accorde peu de crédibilité avec ou sans un titre. On lui reproche les sautes d'humeur. On lui accorde peu de mérite. On l'utilise comme appât (de même que les enfants) pour séquestrer des gens et leur voler de l'argent. On lui accorde (seulement) 3 mois de congé de maternité.



Etc.

Etc.

Etc.



En réponse à ce machisme, il y a de l'autre côté du spectre, les femmes qui doivent s'habiller et parler d'une certaine manière pour obtenir les mêmes droits que les hommes, comme l'accès à un emploi en blanc, comme on dit ici. Lorsqu'on envoie un CV à un emploi, inclure une photo est fortement recommandé si tu es une femme, car tu as plus de chances de te faire rappeler. Même le site te le fait savoir. Il me semble qu'au Canada ce n'est pas recommandable, puisque cela laisse place à une sorte de discrimination. Mais ici, il semble que c'est la norme. Comme avoir des faux seins, apparemment. Se mettre des implants à un jeune âge ici est monnaie courante; au Brésil ce sont les implants de fesses m'a-t-on dit. Investir sur son apparence physique c'est comme investir sur son futur. Comme s'il y avait un filtre Hooters pour l'accès au marché du travail, géré majoritairement par des hommes avec une mentalité machiste. Les femmes que j'ai vu occuper un poste plus haut dans la pyramide hiérarchique du succès, toute catégorie confondue, ont toutes, par hasard, des implants mammouth, bonnet taille E pour Énorme. Ce n'est pas parce qu'il est un prérequis pour le travail demandé, mais plutôt parce que celui qui t'engage est en général un vieux pervert machiste. Alors oui c'est un prérequis, j'ai changé d'avis. Mais tu vois, «au moins» elle a un travail en blanc et un salaire qui lui permet de vivre, et non de survivre, comme le 98% des Argentins.


Une chose c'est de vivre dans une société qui valorise la femme à travers son aspect physique; une autre chose c'est de vivre dans une société qui l'utilise comme standard. Et ne pensez pas que cela n'arrive qu'aux pays en développement! L'Asie, que l'on vénère pour son leadership technologique et son potentiel économique, est la première au banc des accusés, pour avoir non seulement des standards de beauté féminine incompatibles avec leur génétique (la forme des yeux par exemple) mais également pour favoriser (encore aujourd'hui, même si moins) les garçons que les filles. Les avortements de bébés filles sont encore monnaie courante et les orphelinats sont occupés majoritairement par des filles.


Je crois que l'éducation joue un grand rôle dans ce cercle vicieux, mais cela prend plusieurs années à ce que la mentalité d'un pays change - sauf si on devient tous déments #NEIN ou si on a l'équivalent de Jésus ou Ghandi contemporain. Mais plus Jésus. Et l'histoire de la samaritaine.




3. L'harcèlement et les abus


En parlant avec plusieurs femmes de mon entourage, j'ai posé la question si elles avaient déjà subi du harcèlement au travail (ou ailleurs) au cours de leur vie, et elles ont ri tellement la question était absurde et évidente. C'est pour elles une réalité quotidienne. Elles m'ont raconté qu'elles se font souvent harceler par leur patron ou par leurs collègues, qui passent des commentaires déplacés. Ou sinon, ce sont des pognages de fesse sporadiques et spontanés dans la rue par des inconnus. Ou sinon, c'est l'ami d'un ami. Ou sinon, et pire à mon avis, c'est quelqu'un de la famille. Apparemment, se faire harceler ici est quelque chose à laquelle il faut s'y attendre tôt ou tard, quelque chose dont on ne peut pas empêcher d'arriver, une histoire déjà inscrite dans le livre de notre enfance. La beauté devient une malédiction plutôt qu'une bénédiction.


Dans ma tête, au Canada, on m'a appris à être en mode offensif et de dénoncer tout harcèlement ou abus, ou du moins, en parler à quelqu'un. Mais avec les années, j'ai constaté que ce n'est pas toujours évident, car chaque histoire d'abus ou d'harcèlement a un contexte qui peut brouiller notre décision et le dénoncer peut avoir des conséquences tout aussi néfastes. Ce n'est pas toujours aussi évident. C'est pourquoi plusieurs femmes ici, et partout dans le monde j'imagine, se taisent et vivent avec cette lourde charge pendant plusieurs années; pour certaines, toute leur vie. Plusieurs femmes ont vécu une histoire d'harcèlement ou d'abus, cela n'est pas propre à un âge ni à une nationalité ni à une période spécifique de l'histoire. Le bris du silence s'est fait notamment promouvoir par le mouvement #metoo, en 2017, un mouvement qui dénonce l'harcèlement et l'abus sexuel particulièrement en milieu de travail, et qui a pris une proportion considérable dans les mois qui ont suivi. Je ne sais pas si ce mouvement a eu un impact réel dans la société, mais plusieurs questions sont à réfléchir:


- Pourquoi voit-on la femme de cette manière?


- Pourquoi existe-t-il encore des pays qui luttent pour le droit à la vie (de la femme) encore en 2019?


- Peut-il y avoir un milieu entre la femme violentée et la féminazie?


- La pornographie a-t-elle quelque chose à avoir dans tout cela?


- À qui revient la responsabilité de l'éducation sexuelle?


- Dans un pays capitaliste, comment concevoir la prostitution? Est-ce une expression de la liberté de la femme ou bien une insulte à la lutte des Suffragettes?


-Si dans un divorce, la mère a plus des chances d'obtenir la garde des enfants, c'est qu'on lui attribue des qualités que le père n'a pas...... mais sur quelles bases? Que deviennent ces qualités tantôt défendues par le système judiciaire, tantôt ignorées par ce même système?


-Existe-t-il des fausses accusations d'abus? L'accusation peut-elle être utilisée comme un outil au profit de quelqu'un?


-Saviez-vous qu'il existait une « Journée internationale de l'homme »??



Ce n'est pas une blague. C'est le 19 novembre, apparemment. Je ne sais pas pour vous, mais moi je n'en avais aucune idée, puisqu'à cette date-là habituellement je me demande si je veux un vrai ou un faux sapin de Noël et cela enclenche un mini dilemme intérieur entre la vraie fragance du sapin et l'artificielle. J'ai un peu honte d'avoir découvert cela un peu tard.


Je parle de la journée internationale de l'homme, bien sûr. #teamfauxsapin

Mais elle existe, car elle dénonce également des réalités inquiétantes chez les hommes, sur la planète Mars, comme le suicide. Les hommes sont trois fois plus enclins à commettre un suicide que les femmes, statistiquement parlant.


C'est inquiétant. C'est tragique. C'est triste. C'est angoissant.




Bon, comme à l'habitude, je vais mettre des photos plus bas, mais je vous préviens, ce ne sont pas des photos aptes pour tous âges. #PG14 Je vous les partage parce que je crois que c'est important d'en parler. C'est important de discuter des sujets aussi sensibles comme ceux que j'ai mentionné plus haut, pour pouvoir conscientiser chaque individu aux douleurs de l'humain, martiens comme vénusiennes. Il me semble qu'une histoire de vie possède beaucoup plus d'action et de drame qu'une émission des Kardashians ou d'Occupation Double. Alors parlons-en, posons-nous des questions (avec respect)!


Mais c'est davantage plus important d'avoir cet espace de dialogue où l'on peut parler des choses, sans s'offenser au moindre mot. Et ce, même au risque de voir notre orgueil en prendre un coup, comme en admettant une pensée erronée et la changer, malgré un courant de pensée populaire, ou bien malgré nos propres croyances (religieuses ou non). Apprendre à dialoguer signifie d'abord apprendre à écouter, puis `à décoder, puis à réfléchir, puis à répondre. Ça s'apprend. Et si ça s'apprend, c'est qu'au départ, on ne sait pas nécessairement comment s'y prendre. #ECR #wassup *dab*





Bref, bonne journée internationale des droits des femmes.







Lu.







P.S: Pour les curieux qui ont du temps à perdre, voici les références que j'ai utilisé:


[1] Le mouvement #niunamenos: https://fr.wikipedia.org/wiki/Ni_una_menos

[2] Le mouvement #metoo: https://en.wikipedia.org/wiki/Me_Too_movement

[3] Le féminicide: https://fr.wikipedia.org/wiki/F%C3%A9minicide

[4] Quelques stats de machisme en Argentine: http://contalaviolenciamachista.com/resumen.html

[5] Journée Internationale de l'homme: https://fr.wikipedia.org/wiki/Journ%C3%A9e_internationale_de_l%27homme

[6] Mon cerveau.



P.S 2 : Merci pour vos encouragements! Vous êtes les bienvenus à me partager vos opinions et/ou impressions de mon blog.


P.S 3 : Le féminisme est un sujet délicat. Bien que ma position à ce sujet transparaît à travers cet article, j'apprécie les discussions 1-1 pour mieux expliquer mes propos, alors n'hésitez pas à m'écrire si le coeur vous en dit.















 
 
 

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